Depuis son inscription en 2004 dans le Code civil la résidence alternée (RA) est source d’innombrables débats. Le dernier fait suite au rapport du sénateur Lacovelli préconisant la RA lors d’une séparation parentale.
L’intention d’organiser un temps équivalent pour l’enfant chez chacun de ses parents peut se comprendre. Mais si l’on se met à hauteur d’enfant, cela permet de réaliser que cette proposition du rapport est une fausse bonne idée ; et les raisons sont multiples.
La première est que les besoins de l’enfant devraient primer sur toutes décisions le concernant. Le Dr. M.P Martin-Blanchais a rendu le 28 février 2017 un rapport remarquable qui décrit les besoins fondamentaux de l’enfant; rapport totalement méprisé par les partisans d’une injonction à la RA. Les besoins de l’enfant évoluent selon les âges et il est fondamental qu’un enfant puisse grandir dans un environnement, protecteur, sécurisé et dans une continuité de prise en charge. Imposer la RA organise un forçage des liens qui ne peut être que déstructurant psychiquement pour l’enfant, mais aussi pour ses parents. S’il apparait comme l’intérêt de certains parents, il n’est en rien celui de l’enfant en particulier des plus jeunes pour lesquels la RA n’est pas adaptée (cf. les publications de la WAIMH – World Association for Infant Mental Health).
La seconde raison est qu’imposer la RA conduira bien des parents qui ne souhaitent pas s’investir auprès de leur enfant à y être forcés avec tous les risques de malveillance, voire de maltraitance à l’égard de l’enfant. Être parent n’est pas qu’une question administrative. Devenir parent ne se décrète pas par des textes de loi, mais engage des processus psychiques complexes et des dynamiques variables d’un parent à l’autre. Et nous savons que pour certains adultes, naître parent n’est ni pensable, ni possible. Ce n’est pas à un enfant de réparer la parentalité de son parent et tant que les institutions fonctionneront avec ce paradigme, les enfants continueront d’être sacrifiés.
Enfin les études sur le contrôle coercitif alertent sur le fait que lors d’une séparation parentale, l’auteur utilise les procédures judiciaires pour poursuivre ses violences et la RA lui offre un support remarquable pour continuer d’agir.
Ce projet de loi consiste à réduire l’enfant à un objet de consommation juste bon à être divisé en deux quand les parents se séparent.
En 2024 il est incompréhensible que les besoins de l’enfant soient toujours autant méprisés. La France ne cesse de faire la leçon à tant d’autres pays sur le fait qu’elle est le pays des droits de l’homme. Cela est plus que discutable sur un grand nombre de sujets, mais ce qui est certain, c’est qu’elle est loin d‘être le pays des droits de l’enfant.
Tant que l’idéologie familialiste primera sur le respect des besoins de l’enfant, la protection de l’enfance restera un slogan vide de sens.